Lorsque j’ai fait mes premiers pas dans la profession, au début des années soixante-dix, l’Etat Français pourvoyait largement au financement de ses Laboratoires Universitaires. Cette situation confortable n’était pas représentative de l’ordre mondial dans ce domaine.
Au Canada, j’ai pu constater, peu de temps après, que la participation financière de sociétés et organismes publics aux programmes de recherche universitaires, dont l’attribution n’avait rien d’automatique, était la règle.
En Tunisie, quelques années plus tard, l’Etat équipait le Pays et donc fournissait les infrastructures. Concernant le mode de fonctionnement, notamment pour les produits chimiques, la situation était plus délicate. Il fallait souvent se les procurer par des méthodes pas toujours orthodoxes.
A mon retour à Toulouse, les deux chocs pétroliers étant passés par là, il m’a fallu m’inspirer au plus vite des méthodes nord-américaines.
Cela a plutôt bien réussi puisque, j’ai pu au fil des ans, développer de nombreux axes de recherche centrés sur la chimie de la biomasse avec la catalyse acido-basique comme outil réactionnel principal.
C’est donc à partir du carbone de la ressource fossile charbon mais surtout pétrole que la Chimie Organique a connu son formidable essor au XXème siècle tant sur le plan de la compréhension de ses mécanismes réactionnels que pour l’extraordinaire diversité de produits nouveaux qui furent synthétisés.
Ceci s’explique par le fait qu’il est aisé de produire et séparer les molécules de base que sont les hydrocarbures saturés et insaturés à partir des ressources fossiles de carbone.
Le chemin simple et direct vers la complexité croissante passa par l’oxydation contrôlée ou catalytique. Les composés carbonylés obtenus constituèrent alors la principale classe de composés organiques. Il suffit ensuite de les oxyder encore sans aller jusqu’au gaz carbonique, les réduire et procéder sur les molécules obtenues à des échanges entre l’oxygène et d’autres hétéro- atomes au premier plan desquels l’azote pour construire l’essentiel de la Chimie organique.
Ce travail considérable, la nature le fait chaque jour par le biais de la photosynthèse et des réactions biochimiques qui suivent pour aboutir à des structures d’une complexité très supérieure qu’il est exclu de séparer par une simple distillation initiale comme dans le cas du raffinage pétrolier. La différence est fondamentale.
Le chimiste qui utilise la biomasse comme matière première devra souvent partir d’une situation moléculaire complexe pour aller vers des molécules du quotidien beaucoup plus simples, à l’usage voisin ou identique à celles issues du pétrole qui sont la référence industrielle actuelle.
Il devra faire appel à des séparations et des transformations chimiques ou biochimiques pour, par exemple, réduire le niveau trop élevé d’oxygène dans les sucres et souvent associer catalyse enzymatique et chimique.
Il faudra que les solutions proposées soient à la fois économiques et écologiques. C’est à ce considérable enjeu qu’est confronté aujourd’hui la chimie de la biomasse avec, comme nous le verrons, beaucoup d’atouts pour le gagner.
De plus le caractère renouvelable de la biomasse permet d’inscrire sa transformation en produits du quotidien ou énergie dans le cadre du développement durable, devenu depuis quelques années une préoccupation économique et politique majeure sous toutes les latitudes.
La carbochimie marqua le XIXème siècle, la pétrochimie le XXème siècle, la chimie de la biomasse sera, comme vous allez le découvrir, si vous n’étiez pas déjà convaincus, celle du XXIème siècle.
J’ai ainsi dirigé ou codirigé 78 thèses de doctorat, déposé 55 brevets internationaux, présenté près de 270 conférences et communications dans des congrès internationaux et publié plus de 200 articles dans des journaux scientifiques internationaux de premier plan.
Tous ces travaux ont comme objectif la mise au point de technologies propres où ce qui n’est pas un produit utilisable est recyclé. Ils sont résumés et référencés par thème :